Dossiers mardi 2 août 2022
Passionné par le dialogue entre le droit et la société
Me Robert Leckey, Ad. E.
Par Marie-Hélène Paradis
Ce brillant universitaire et professeur, expert en droit constitutionnel et droit de la famille, est aussi doué pour vulgariser le droit et expliquer la pertinence des changements législatifs et judiciaires québécois. L’impact de ses recherches s’étend au-delà des frontières du Québec et de la profession juridique, et rayonne sur les scènes nationales et internationales. Faites connaissance avec Me Robert Leckey, doyen de la Faculté de droit à l’Université McGill où il est aussi professeur titulaire et titulaire de la Chaire Samuel Gale.
De la littérature anglaise au droit
Me Robert Leckey a d’abord complété un baccalauréat en littérature anglaise avant de s’intéresser au droit. « C’est la joute orale compétitive que je faisais avec des collègues en droit qui m’a d’abord intéressé. À la fin de mes études, j’ai travaillé dans le milieu financier. J’écrivais des discours pour le président de l’association de l’industrie des fonds communs de placement. En observant de plus près le travail des avocats que je côtoyais, je me suis dit qu’après tout, ce n’était pas si inintéressant! Je suis donc retourné aux études à l’Université McGill pour faire des études en droit. »
Lorsqu’on lui fait remarquer qu’il y a loin de la littérature au droit, Robert Leckey répond que la philosophie et la littérature sont de très bonnes bases pour le travail d’avocat, lequel exige une bonne capacité d’analyse, de rédaction et de vulgarisation.
La vie universitaire
Rapidement, c’est la sphère universitaire qui a occupé principalement son parcours professionnel. Après avoir pratiqué le droit à Toronto et à New York, il a fait des études supérieures, et s’est mis à enseigner à l’Université McGill à compter de 2006. Il y est aujourd’hui doyen de la Faculté de droit.
Universitaire influent, Me Leckey a produit des recherches sur les conceptions juridiques de la famille et de la parentalité chez les personnes gais et lesbiennes. Il s’intéresse à la possibilité de refléter la vie sociale dans le droit mais, selon lui, l’écart actuel qui s’inscrit entre les lois et la réalité des familles hors mariage a pour conséquence que les gens ne sont pas en mesure de comprendre leur situation juridique. « Il y a un écart trop grand entre la définition technique et la définition que les gens lui donnent dans la vie de tous les jours. Le législateur a perdu le contrôle sur des termes techniques comme la résidence familiale, par exemple, puisque la société est allée plus loin. Il faut amener les lois au niveau de la vie quotidienne. Je crois que le droit a perdu sa vocation de réglementer la famille. Pour ma part, c’est ce dialogue entre les avocats et les gens que j’apprécie particulièrement », explique-t-il.
Me Leckey est un vulgarisateur habile et apprécié. Il aime d’ailleurs beaucoup communiquer dans les médias sur des sujets d’importance qui concernent le milieu de l’enseignement et le milieu juridique, et il n’hésite pas à le faire dans un langage plus simple et moins technique afin de faire comprendre les subtilités des lois et de leur application.
Ses étudiants
« Rien ne me préparait à l’enseignement! C’est plutôt la recherche qui m’a mené vers l’université. Ce n’était pas évident pour moi au début, mais j’ai beaucoup écouté mes collègues et consulté les évaluations des étudiants. J’ai appris qu’il fallait parler à tous les étudiants et que ceux-ci représentaient différentes façons d’apprendre. Le sujet de mon premier cours portait sur les contrats. Il m’a fallu convaincre mes étudiants que c’était intéressant de comprendre les notions de rapports de force, d’autonomie, de choix et de consentement. Malgré les difficultés et les erreurs, ils ont fait de moi un meilleur professeur. »
Y a-t-il un élément de sa carrière ou une réalisation qui le rend fier? La fierté, dit-il, il la trouve dans les témoignages de ses anciens étudiants ou quand il les voit réussir et s’établir dans leur carrière. La reconnaissance qu’il chérit le plus, c’est le Prix d’excellence en enseignement John Durnford qui lui a été remis après trois ans d’enseignement seulement par l’association des étudiants. Il apprécie également la reconnaissance qui lui est faite par le Québec. « Depuis 1998, le Québec me fait l’honneur de reconnaître les efforts que j’ai faits pour m’implanter dans le paysage professionnel québécois. »
En conclusion, il réitère l’importance de montrer aux étudiants que, peu importe le sujet du cours et même si celui-ci ne les intéresse pas a priori, il y a toujours quelque chose à apprendre.